des regards fuyants dans le miroir. une pause presque étrange sur la palier de la porte. inspiration. expiration. huit ans. la fin de la journée à la mer. et sa mère qui vient le chercher. parce que c’est encore le à ce moment là. et qu’il y a quelque chose qui colle pas à l’intérieur. les mains tendres contre ses joues. le sel sur ses lèvres, ses larmes comme un océan intérieur. ses sanglots. soubresauts qui le secouent. l’indignation dans son regard. la fragilité dans ses mots. l’hystérie qui gronde. parce qu’il est pas là son père. parce que les autres mamans elles l’ont croisé. parce qu’ils les a abandonnés. la soirée dans le sable. la pluie qui tombe sur eux. maman qui raconte. maman qui explore le sable, et l’emmène. maman qui lui dessine son sourire. maman qui lui assure que son père c’est poséidon. petit poisson. doux murmures. boyeon l’enfant de la mer. l’enfant de sa mère.

première année de secondaire. la peur au ventre. le regard baissé. et ses mains toujours trop petites qui se serrent sur les lanières de son sac. murmures sur son passage. regards dans son dos. mais elle recule pas boyeon. c’est pas encore tout à fait elle. c’est un entre deux étrange. c’est un uniforme de fille, avec ses cheveux fraichement colorés, argenté, et son sourire tordu. c’est les grands qui l’observent. c’est les tremblements retenues. une main sur son épaule, un sourire qui lui rappelle celui de sa mère. et c’est soudainement plus simple de respirer. un garçon qui ébouriffe ses cheveux, une fille qui admire ses ongles. et son sourire. elle est heureuse boyeon. les gens acceptent ce qu'elle ne comprend pas encore, et le soutien est réelle. elle repart la tête haute. des signes de main et des promesses de se voir le lendemain. elle repart avec un sourire qu'elle n'avait pas, et le coeur moins lourd.

elle. c’est définitif. elle. et l’administration qui ferme ses yeux. elle. ses sourires à foison, ses rires en cascades. elle, brillante, virevoltante, un caractère affirmé, des amitiés nouées, solides. indélébiles. elle. boyeon. coqueluche du lycée. boyeon. reine du bal de promo. boyeon qui danse au bras de tous les garçons. boyeon qui embrasse les anciens et profite. elle s’amuse. intemporelle. sans entrave. elle vit. le cœur rugissant, ses yeux remplis d’étoiles. elle veut continuer comme ça. mais elle comprend aussi. que le monde ne peut pas tout accepter. elle comprend. mais l’acceptation est douloureuse. et c’est des larmes comme du sel qui ronge sa peau qui coulent sur ses joues tandis qu’elle coupe sa belle chevelure. et c’est la rage sourde au ventre d’une société mauvaise qu’elle range ses talons, ses robes, son maquillage. et quand on l’appelle monsieur au téléphone, c’est un sourire triste aux lèvres qu’elle accepte. c’est dans des sanglots déchirants tandis qu’elle part pour busan, sa mère ne la suivant pas. peut-être que son père c’est vraiment le dieu de la mer, de sa mère, et qu’elle ne veut pas le quitter.

la journée c’est l’uniforme du café. pronoms déplacés. sourires automatiques. odeur de café, et c’est boyeon rendu masculine par la société. mais heureuse de ce qu’elle fait. heureuse de ce qu’elle a accompli. pourtant une fois le tablier enlevé, les tasses de café avec des cœurs dans la crème vidées, nettoyées. c’est elle. jambes vertigineuses. pied orné d’un escarpin charmant. elle. une silhouette travaillée. elle, des vidéos, des photos sur internet derrière un pseudonyme. et son ego qui ronronne comme la mer au matin. maquillage au point. les soirées à profiter avec ses amis, son entourages. des histoires sans lendemains sans qu’elle ne s’offusque. jusqu’à ce dernier. il y avait quasiment un an. une nuit d’été. ce dernier qui n’était jamais parti, l’emportant dans son sillage. son cœur comblé. lui. qui l’accepte. la soutient. lui qui semble ne jamais se lasser. aussi passionné qu’elle. lui protecteur, aimant, juste aimant. lui dont le nom roule sur ses lèvres à elle. lui dont elle est si fière, ses bras l’enserrant comme la caresse de l’océan, se refusant à le laisser partir. lui qui l’emmène à la plage, la laisse courir sous la pluie, rugir contre l’orage et peinturlurer ses ongles quand elle a déjà fait les siens. lui comme une prédilection. lui qui se perd le matin contre la soie de sa peau, tandis qu’elle rit et l’embrasse. elle est heureuse boyeon.